Même si on n’entend rien à la motocyclette, en lisant le livre de Gilles Treton, on a envie d’en piloter une, de ressentir cette souplesse pneumatique, cette ivresse dominée, ce rapport à l’espace, à la nature grande ouverte, comme un témoin privilégié dans la saisie du monde.
C’est presque un clan que forment les hommes et les femmes de ce roman. Ce sont des personnages à la fois bruts et délicatement ciselés, dont la sensibilité est parfois trahie par une violence oubliée qui gronde encore en eux. Il y a des coups et du sang dans ce livre et une tendresse timide qui n’ose pas s’exprimer mais se fraye pourtant un chemin.
Ils n’iront pas à Milwaukee, Wisconsin, où siège la maison mère de Harley Davidson, ni sur la Route 66, et peut-être est-ce mieux ainsi, leur rêve aurait pu être abimé. L’un d’eux poussera jusqu’en Italie où l’attend ce qu’il n’imaginait plus.
La langue de Gilles Treton est concise, instinctivement élégante, populaire aussi mais jamais populiste, universelle comme la simplicité. Elle excelle à montrer le chrome d’une moto, la flèche d’une cathédrale ou la naissance d’un amour.